Quel est votre recours si votre locateur a obtenu une reprise de logement ou votre éviction de mauvaise foi ?
En tant que locataire, vous avez un droit important en droit du louage appelé « droit au maintien des lieux » [1]. Cela signifie que votre locateur ne peut vous évincer du logement uniquement dans les cas spécifiques prévus par la loi. En ce sens, l’éviction pour subdivision, agrandissement ou changement d’affection du logement [2] ou la reprise de logement pour s’y loger ou loger sa parenté [3] sont les motifs principaux qui permettent à un locateur de reprendre possession de son logement.
Cependant, lorsque votre locateur vous a fait quitté en soulevant l’une de ces raisons mais que vous découvrez par suite qu’il était de mauvaise foi, vous n’êtes pas sans recours face à cette faute. En effet, vous pouvez obtenir des dommages-intérêts contre votre ancien locateur, que vous ayez consenti ou non à l’éviction ou la reprise de logement [4].
D’abord, il faut s’assurer que le locateur était de « mauvaise foi » aux yeux des tribunaux. Pour faire droit au recours, le locateur doit avoir utilisé la reprise de logement ou l’éviction de façon déguisée pour atteindre d’autres fins. Ainsi, la mauvaise foi doit exister au moment de la demande d’éviction ou de reprise de logement. De plus, il est interdit à un locateur de louer ou d’utiliser un logement pour une fin autre que celle pour laquelle l’éviction ou la reprise a eu lieu sans l’autorisation du Tribunal [5]. Cela empêche notamment un locateur d’augmente le loyer de façon exagérée lorsqu'il reloue le logement à un autre locataire dans ce contexte [6]. Toutefois, dans le cas où une éviction pour changement d’affection, agrandissement ou subdivision a réellement eu lieu tel que prévu, les tribunaux n’y verront généralement pas de mauvaise foi et ce, même si le locateur en récolte un profit [7]. Il en est de même pour la reprise de logement.
Par conséquent, si après analyse, vous constatez que votre locateur était bel et bien de mauvaise foi lorsqu’il vous a évincé ou lorsqu’il a repris le logement, vous pourrez intenter contre lui au Tribunal administratif du logement une demande pour obtenir un dédommagement. En ce qui a trait à ce dernier, il y a généralement deux types de dommages-intérêts qui sont réclamés. Le premier type est compensatoire et vise à pallier les préjudices directement causés par la reprise ou l’éviction de mauvaise foi. Il peut s’agir notamment de la différence entre votre loyer actuel et le loyer que vous aviez auparavant pour une année, du stress et des inconvénients liés à toutes les démarches entreprises pour vous trouver un autre logement et du fait que le logement ne correspond pas à vos besoins, etc. Ensuite, le second type est punitif et vise en quelque sorte à « donner l’exemple » aux autres locateurs qui seraient tentés de reproduire le comportement reproché.
Pour terminer, un exemple classique d’une reprise de logement de mauvaise foi est lorsque le locateur prétend reprendre son logement pour y héberger un membre de famille mais désire en réalité le vendre. Ainsi, la mise en vente ou la vente d’un immeuble dans de telles circonstances a déjà été sanctionné par le Tribunal administratif du logement [8].
[1] Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1936. [2] Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1966. [3] Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1957. [4] Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1965. [5] Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1970 et Bisson c. Picard, 2015 CanLII 127782 (QC RDL). [6] Vallières c. Mainville, 28-061102-002 G, 4 février 2009, Danielle Dumont juge administratif; Dubé c. Gervais, 04-090429-001 G, 22 octobre 2009, Danielle Dumont juge administratif. [7] Gingras c. 9380-3831 Québec inc., 2020 QCTAL 1778, par. 63, 64. [8] Voir notamment Béland c. Lafrance, 2019 QCRDL 29583, W.N. c. Malik, 2021 QCTAL 31364, Winiarz c. Pinna, 2013 CanLII 126837 (QC RDL).
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