La jonction des instances : Quand et pourquoi en faire la demande
Lorsqu’il est possible de tisser des liens entre deux recours ou plus, il est de bonne pratique de prendre le temps d’analyser ce qui permet d’établir ces rattachements. En effet, l’analyse de l’objet de ces recours pourrait permettre d’en arriver à constater qu’une ou plusieurs autres demandes en justice pourraient avoir un impact sur le dossier que vous présenterez au tribunal. Cette possibilité peut être inquiétante puisqu’il est possible que l’issue de votre procès puisse en être affectée. Lorsqu’ on peut établir une certaine connexité entre plusieurs recours, il faut alors songer à l’opportunité de les réunir par une demande visant à obtenir la jonction des instances.
Les prochaines lignes permettront de brosser le tableau de cette mesure prévue par le Code de procédure civile, ci-après le « C.p.c. »
Il convient tout d’abord de référer à la disposition législative qui prévoit la jonction d’instances. Cette mesure est prévue par l’article 210 du C.p.c. ;
Art. 210 C.p.c :
« Le tribunal peut, même lorsque les demandes ne résultent pas de la même source ou d’une source connexe, ordonner la jonction de plusieurs instances entre les mêmes parties portées devant le même tribunal, pourvu qu’il n’en résulte pas un retard indu pour l’une d’elles ou un préjudice grave à un tiers.
Il peut en outre ordonner que plusieurs instances pendantes devant lui, entre les mêmes parties ou non, soient jointes pour être instruites en même temps et jugées sur la même preuve ou ordonner que la preuve faite dans l’une serve dans l’autre ou que l’une soit instruite et jugée avant les autres.
Il peut également, si plusieurs demandes ont été jointes, ordonner qu’elles soient disjointes en plusieurs instances, s’il l’estime opportun eu égard aux droits des parties. »
Le premier aliéna de cet article nous fait comprendre que la jonction d’instances peut être prononcée d’office par le juge de gestion ou faire l’objet d’une demande de la part d’une des parties à une des instances visées. Dans ce dernier cas, la demande est soumise à la discrétion du juge même en présence ou en l’absence de certains éléments qui militent pour qu’une jonction d’instances puisse être ordonnée. Le pouvoir de discrétion du juge est donc prédominant lors d’une telle demande, ce qui fait que même en présence d’un faible lien de connexité il est possible que la Cour ordonne la jonction des instances.
Dans le cas où l’on obtient une ordonnance prévoyant seulement que les instances soient instruites en même temps, le magistrat qui entendra les causes au fond ne les jugera toutefois pas sur la même preuve. C’est ici qu’il faut y voir la nécessité d’appliquer un principe d’économie des ressources judiciaires en présentant une demande de jonction d’instance. Ce principe d’économie vise ainsi la saine administration de la justice dans un esprit de proportionnalité en évitant de multiplier les recours inutilement.
Cela dit, la jonction d’instances permet de chercher à limiter les procédures et ainsi économiser le temps et les ressources du système de justice ainsi que les frais relatifs à ces recours judiciaires qui proviennent de la même source ou qui ont une connexité. Pour qu’on puisse voir ce principe d’économie s’appliquer, il faut que les instances soient jointes et alors à ce moment les instances pourront non seulement être instruites en même temps, mais aussi jugées sur la même preuve.
C’est l’alinéa 2 de l’article 210 du C.p.c qui pose cette exigence de joindre les instances pour qu’elles puissent être jugées sur la même preuve. Ce paragraphe prévoit aussi qu’il est possible qu’une ordonnance soit rendue afin « que la preuve faite dans l’une serve dans l’autre [instance] ou que l’une soit instruite et jugée avant les autres ».
L’alinéa 1 de ce même article évoque des conditions que le juge en charge de décider de joindre ou non les instances devra apprécier à sa discrétion. La loi avance que les demandes à joindre doivent émaner de la même source ou d’une source connexe. La connexité est un élément qui exigera que l’avocat qui demande la jonction des instances fasse la dissection des recours impliqués afin de démontrer au juge quel est le lien de droit qui unit les instances. Cet examen pourra aussi permettre de démontrer l’existence d’un risque d’obtenir des jugements contradictoires si les causes étaient instruites et jugées séparément.
Il est aussi mentionné que ce sont les mêmes parties qui doivent être impliquées dans les demandes qu’on veut voir jointes et qui sont portées par ces parties devant le même tribunal.
Finalement, La jonction d’instances ne doit retarder indûment l’instance et ne doit être préjudiciable pour l’une ou l’autre des parties impliquées.
Conclusion
On pourrait donc résumer les principes devant guider la jonction d’instances comme cela :
· Analyser le lien de droit qui rattache les causes au regard de la connexité qui existe entre ces recours;
· Rechercher la saine administration de la justice, en visant la proportionnalité des procédures;
· Analyser et démontrer qu’il y a un risque que des jugements contradictoires soient prononcés ;
· Considérer l’opportunité d’éviter de multiplier les recours sans raison ;
En terminant, l’art. 32 C.p.c mentionne qu’une décision sur la jonction d’instance ne peut faire l’objet d’un appel à moins d’obtenir la permission d’en appeler d’un juge de la Cour d’appel.
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