La contestation ou l’annulation d’un testament
La perte d’un proche est une épreuve pénible. La situation peut d’ailleurs se complexifier lorsque des membres de la famille doivent contester le testament ou certains legs devant les tribunaux. Il s’agit d’une décision difficile ayant fréquemment un impact sur les liens familiaux.
La majorité des contestations testamentaires sont en lien avec deux motifs, soit pour cause d’incapacité ou pour cause de captation. Dans ce billet, explorons ensemble ces deux motifs de contestation.
La contestation d’un testament pour cause d’incapacité
Le testament est un acte de volonté, il ne peut être valable que si son auteur a exprimé un consentement exempt de vices. En effet, le Code civil du Québec indique à son article 703 que «[t]oute personne ayant la capacité requise peut, par testament, régler, autrement que ne le fait la loi la dévolution, à sa mort, de tout ou partie de ses biens».
Selon la doctrine et la jurisprudence actuelles du Québec, les critères de la sanité d’esprit sont la capacité d’une personne d’apprécier la portée et les conséquences du testament qu’elle s’apprête à signer, ainsi que sa compréhension du sens et de la portée des dispositions contenues à l’acte et de s’y arrêter volontairement.
Il est possible de faire invalider un testament si l’on démontre que le testateur n’avait pas la capacité de tester. Il n’est pas nécessaire de convaincre le tribunal hors de tout doute raisonnable que la personne n’avait pas la capacité de tester. La preuve soumise, par prépondérance de preuve, devra convaincre le juge que l’état d’incapacité du testateur est plus probable que l’état de capacité. En effet, la Cour d’appel a rappelé sous la plume de la juge Mailhot qu’«[e]n matière de capacité de tester, le principe cardinal est que le fardeau de prouver l’incapacité incombe au plaideur qui demande la nullité de l’acte puisque chacun est présumé être sain d’esprit»[1].
Afin de renverser le fardeau de la preuve, le demandeur doit présenter une preuve prima facie de l’insanité d’esprit du testateur. Une fois cette preuve faite, le fardeau de la preuve est déplacé sur les épaules de la partie défenderesse qui plaide que le testateur était dans un état de capacité lors de la signature de son testament. Les preuves présentées reposeront sur les témoignages de gens de l’entourage, des témoins de la signature du testament ainsi que des professionnels de la santé qui suivaient l’évolution du testateur avant son décès.
Les mêmes moyens de preuve seront utilisés par la partie qui réfute l’incapacité du testateur. Il est possible de tenter de démontrer au tribunal que le testateur a couché ses dernières volontés lors d’une période de lucidité. Ensuite, il est aussi possible de tenter de démontrer au tribunal la raisonnabilité des dispositions testamentaires contestées, cela fera partie du faisceau de preuves soutenant la thèse de la capacité.
Bien que les notaires se montrent prudents dans l’exercice de leur profession, posent des questions, discutent et sondent sommairement la capacité mentale de leur client, ceux-ci ne sont pas des spécialistes ou des experts dans l’évaluation de la capacité mentale. En effet, le notaire n’a pas pour mission d’analyser la capacité mentale de son client lorsqu’il signe son testament.
La contestation d’un testament pour cause de captation
Un testament peut être annulé pour dol, c’est-à-dire lorsqu’il y a présence de manœuvres frauduleuses et que celles-ci ont réellement provoqué la décision du testateur. La Cour d’appel exprimait dans Duquette c. Thibert :
« Pour établir la captation, il faut prouver l’existence de manœuvres dolosives ou frauduleuses. Il ne suffit pas de faire la démonstration que la personne a simplement essayé de s’attirer les faveurs de la testatrice [..]»[2]
Sont considérés comme dolosifs les pratiques artificieuses, comme l’interception de la correspondance ou le fait d’écarter des visites, ou encore le dénigrement. Il faut bien sûr que ces manœuvres frauduleuses aient été déterminantes.
Celui qui allègue la captation doit en faire la preuve. La personne qui demande la nullité du testament doit faire la preuve des manœuvres dolosives et que sans ces dernières, le testateur aurait testé de manière différente.
Dans le cas d’un legs à un membre d’un établissement de santé, le Code civil à son article 761 prévoit que : « [l]e legs fait au propriétaire, à l’administrateur ou au salarié d’un établissement de santé ou de services sociaux qui n’est ni le conjoint ni un proche parent du testateur, est sans effet s’il a été fait à l’époque où le testateur y était soigné ou y recevait des services. Le legs fait au membre de la famille d’accueil à l’époque où le testateur y demeurait est également sans effet ». Ainsi, il y automatiquement captation lorsqu’un legs est fait à un membre d’un établissement de santé et que le testateur y réside ou y reçoit des soins.
Si vous vivez un conflit en lien avec un testament ou si vous avez des questions, n'hésitez pas à nous contacter concernant votre situation au 819-471-9491.
[1] Bertrand c. Opération Enfant Soleil, J.E. 2004-777 (C.A.), par. 42. [2] Duquette c. Thibert, J.E. 2004-9777 (C.A.), paragraphe 12
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